La Marquise Kaeda Lycaeus (Lien) avance dans le couloir menant les invités à la grande salle de réception.
Chaque pas résonne comme un écho ancestral, tandis que le marbre sous ses pieds vibre au rythme d'une tradition millénaire. Les draperies d’or et de bleu canard, luxuriantes et opulentes, se meuvent autour d’elle comme des voiles en suspens dans un océan de marbre. À soixante ans passés, les rides de son visage ne sont pas seulement les marques du temps, mais aussi le témoignage de batailles passées dans les recoins obscurs de la politique, des négociations commerciales et de l’espionnage. Les années et les intrigues s'entrelacent avec la dignité austère qu'elle porte comme une armure invisible. Le chemin est illuminé par des globes lumineux suspendus dans l’air, comme autant de sentinelles silencieuses. Leur lumière dorée se mêle aux ombres dansantes projetées sur les fresques historiques des murs. Kaeda les observe avec une réserve calculée, ces peintures d'épopée ancienne où les batailles d’autrefois sont les répliques des affrontements présents : seuls les acteurs changent, tout comme les informations cachées dans les coulisses du pouvoir. Chaque fresque, magnifiée par les globes, révèle des détails que seuls les observateurs experts peuvent déchiffrer, reliant les luttes passées aux manœuvres politiques actuelles. La cheffe de
la Maison Lycaeus (Lien) fait partie de ceux-là.
À ses côtés, son époux,
Osian Oryndel (Lien), est son pilier de tranquillité dans cet univers tumultueux. Sa présence mesurée contraste avec l’exubérance environnante, mais elle sait que son calme est le balancier nécessaire face aux vagues tumultueuses des intrigues politiques. Ses yeux d’un bleu profond, perçants et analytiques, parcourent les visages croisés sur leur chemin. Pour Kaeda, ils sont deux oasis salvatrices pour regagner un peu d’espoir en l’humanité. Elle esquisse un sourire doux à son attention. Sa présence lui est indispensable pour rendre l’atmosphère plus légère et respirable. Cette pensée lui traverse l’esprit, comme on se rappelle à soi-même une évidence avec gratitude.
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Leurs enfants sont également présents, chacun jouant un rôle soigneusement orchestré.
Orla (Lien), leur fille aînée, est l'incarnation même de l'héritière idéale. À quarante-cinq ans, sa stature et son apparence reflètent la perfection attendue. Mais sous cette façade se cache une intelligence stratégique, aussi tranchante que les lames damasquinées de leur Maison. La passion d’Orla pour la botanique est plus qu’un simple passe-temps : c’est une expression de son désir de croissance et d’influence, tout comme la Maison Lycaeus cherche à étendre ses racines dans les recoins les plus cachés du pouvoir. Kaeda songe qu’elle préférerait que sa fille puisse s’y consacrer tout à fait, plutôt que d’avoir à porter le fardeau qui sera, tôt ou tard, pleinement le sien. "
Le bonheur vient en second, lorsque votre sang vous oblige par le devoir", répète-t-elle intérieurement. "
Combien de fois Père me l’a-t-il répété ?" Son regard s’obscurcit l’espace d’un battement de cils.
Kaito (Lien), leur fils cadet, venait de réapparaître après une absence prolongée sur la planète Ginaz. Son retour marquait le terme d'une mission décisive : il représentait la Maison Lycaeus dans un contrat avec l'école des Maîtres d'armes, bénéficiant de leur enseignement d’élite dans le même temps. À trente-cinq ans, il revenait avec une réputation augmentée et une expertise martiale redoutable, bien que son avenir dans la maison reste flou. Serait-il le futur Maître de guerre ou le Maître d'armes de la Maison, conseiller avisé auprès de sa sœur lorsqu'elle succédera à leur mère ? Kaeda sait une chose : chaque pas de son fils est empreint d'une discipline et d'un savoir-faire qui le rendent prêt pour les défis à venir. Elle redoute toutefois qu’il ait hérité de l’inconfort de son père vis-à-vis des arcanes des Faufreluches. "
Sûrement s’y fera-t-il… mais c’est une autre forme de violence qu’il devra s’infliger", tente-t-elle de se rassurer.
Sa présence est désormais partagée avec son épouse,
Eirene Valeria (Lien), sur laquelle son regard glisse. On devine dans ce dernier un mélange de curiosité et de respect. Cette femme, avec son calme implacable et son apparence austère, est un pur produit d’une éducation rigoureuse parmi les Bene Gesserit, un atout précieux dans le jeu complexe des alliances politiques. Son mariage avec Kaito, bien que né d'une stratégie calculée, avait forgé un respect mutuel crucial pour maintenir l’équilibre au sein de la Maison. Certes, il n’y a pas d’amour entre les deux époux, et elle s’attriste quelque peu qu’ils ne connaissent pas ce qu’elle a la chance de vivre elle-même. Néanmoins, elle se réjouit de la complicité amicale et de la confiance qu’ils semblent avoir développées. Elle conclut intérieurement : "
À tout le moins, elle sera sa plus précieuse alliée et sa meilleure conseillère pour naviguer dans les eaux troubles de l’Imperium… Il s’en rendra compte avec le temps."
Alors que la cheffe de la Maison Lycaeus continue d’avancer dans les couloirs opulents, un détecteur de poison discret, enchâssé dans les murs ornés, émet un léger tintement rassurant, signalant que l'air et l’environnement sont sûrs. Malgré le poids des intrigues présentes, son esprit se tourne un instant vers
Caelum (Lien), son unique petit-fils, qui ferme la marche derrière sa mère et son oncle.
À dix ans, il est déjà l'incarnation de la descendance qu'elle a toujours souhaitée pour la Maison Lycaeus. Une fierté qu'elle garde soigneusement voilée derrière son masque de dignité. La stature droite de Caelum, son regard concentré, rappelle à Kaeda la dureté du destin qu’il embrasse peut-être sans même le comprendre pleinement. Ses cheveux roux sombres, épais comme les forêts anciennes de leur domaine, sont l'emblème de cette force naissante, encore cachée sous les traits de l'enfance. Elle se demande souvent combien de temps encore son petit-fils pourra profiter de cette période d'innocence. Déjà, elle perçoit en lui les signes d'une maturité qui la préoccupe. Cette intelligence précoce, cette capacité à écouter et à comprendre les subtilités des conversations des adultes, tout cela le rend unique, mais aussi vulnérable.
Elle voit en lui un garçon curieux, avide de savoirs, mais aussi un rêveur qui trouve refuge dans les jardins luxuriants de la Maison. C’est là qu’il laisse tomber le masque que le monde attend de lui, retrouvant pour un temps sa nature douce et son amour pour les choses simples, loin des fardeaux que le pouvoir imposera un jour sur ses jeunes épaules. Kaeda sait que le chemin de Caelum sera semé d'épreuves, et elle ressent parfois une pointe de regret pour l'innocence qu'il devra inévitablement sacrifier. Elle en a déjà fait la douloureuse expérience pour ses propres enfants. Mais elle est aussi déterminée à veiller sur lui, à s'assurer que, lorsqu'il sera temps, il sera prêt non seulement à diriger la Maison, mais à affronter l'univers impitoyable qui l'entoure.
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À l’extérieur,
la Maison Varykino déploie son faste et son raffinement. Leur palais est un spectacle de luxe, reflet du pouvoir et de l’influence qu’ils exercent sur Moenia.
Dorian Varykino, avec son charisme naturel, et
Althea, avec sa beauté et son ambition, avaient organisé cette soirée avec une précision qui cache la dureté des jeux politiques en cours. La Maison Varykino, en tant que Maison Majeure, savait que chaque événement était une scène où les alliances et les rivalités se déploient avec une finesse calculée. Sous cette façade de splendeur, Kaeda perçoit un tourbillon de tensions et de stratégies. Chaque sourire, chaque échange de courtoisie peut dissimuler des intentions plus sombres, et elle compte parmi celles et ceux qui ne se laissent pas berner. Avoir des yeux et des oreilles partout est leur spécialité, afin de faire tomber les masques et lever le voile.
La loyauté de la Maison Lycaeus envers la Maison Varykino était immuable, mais elle sait que le jeu du pouvoir exige prudence et subtilité. Il faut accepter un jeu de dupes, pour ne pas afficher trop ostensiblement leur allégeance indéfectible. Laisser une part de doute, pour tous ceux qui les observent. Sembler un ami sur la réserve, comme méfiant face à la cruelle réalité des manœuvres inamicales ourdies dans les cercles de pouvoir de l’Imperium. Œuvrer dans la lumière tout en restant dans l’ombre est une danse délicate. L’âme au clair, elle sait pouvoir briller dans les reflets de leurs œuvres d’art damasquinées, convoitées par beaucoup, qui font la réputation de la Maison Lycaeus. La conclusion heureuse du contrat qui les lie désormais à l'École de Ginaz, après une longue et minutieuse tractation, va indubitablement accroître un peu plus l’admiration pour leur savoir-faire, autant qu’elle attisera davantage les jalousies.
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Alors que les portes de la grande salle s’ouvrent devant elle, elle ressent une vague de calme intérieur, une préparation pour le jeu complexe qui va se dérouler. Le silence respectueux est une façade fragile, une illusion de sérénité dans un océan de turbulences politiques. En avançant, elle est consciente de l’équilibre délicat entre l’honneur et la perfidie, prête à naviguer avec une prudence aiguisée à travers les intrigues et les alliances de cette soirée. La fresque des confrontations politiques se déploie devant elle, et la cheffe des Lycaeus, avec une noblesse empreinte de retenue, est prête à jouer son rôle avec la maîtrise et la détermination qui font sa réputation.