[CAMPAGNE] Sous la surface

[Dahey]

LK mid LVI modèle GINAZ, tel était son nom catalogue. Aussi était-il compréhensible qu'elle enviait les noms de guerre avec lesquels étaient rebaptisés les membres de l'unité du Lieutenant MacFotia. Elle se serait bien vu affublée d'un sobriquet plus féroce comme Kamu ou plus ingénu comme Atice. Hélas, son bonhomme manquait bien trop d'imagination pour ça. Il était retenu entre les lignes de sa partition de petits rituels. Même sa façon d'être attentif aux instructions des officiers, de se tenir figé durant tout briefing, puis d’acquiescer tenait du solennel, du cérémoniel.

[[LOUPS] Maître du Jeu]

Le bateau de l'équipe d'enquête approche lentement la base scientifique, l'atmosphère déjà lourde de tension. Même à distance, il est évident que quelque chose ne va pas. La structure, autrefois imposante et bien entretenue, semble avoir subi des années de dégradation en quelques jours. La base est envahie par la rouille, ses panneaux extérieurs déformés, comme si l'océan entier s'était abattu sur elle. Le métal est corrodé, la peinture écaillée, et des morceaux de la structure paraissent sur le point de se détacher.

Lorsque le bateau s'aligne enfin sur le ponton, l'équipe se prépare en silence, suivant scrupuleusement les ordres donnés. Chaque membre se met en position avec la précision d'une horloge militaire. Le ponton grince sous leur poids alors qu'ils se déploient avec prudence, leurs bottes résonnant sur le métal vieilli. Le courant semble coupé : tout est plongé dans le noir, et seules les vagues de l'océan viennent rompre le silence angoissant.

L'ouverture de la porte principale se fait lentement, le grincement sinistre du métal contre le métal accentuant la tension ambiante. Dès que les faisceaux des lampes torches percent l'obscurité, l'équipage découvre un spectacle inattendu : l'intérieur de la station est radicalement différent de la carte initiale qui leur avait été donnée. Une végétation étrangère semble avoir pris racine dans les entrailles de la base. Des plantes, dont certaines aux formes grotesques et non identifiables, ont colonisé les murs et le sol. Leurs lianes s'enroulent autour des structures métalliques, comme si elles cherchaient à s'accaparer chaque recoin de l'endroit.

Ce qui frappe le plus, ce sont les spores. Ils flottent en suspension dans l'air, illuminés par les faisceaux de lumière, créant une ambiance presque irréelle. Les petites particules brillent légèrement, se mouvant doucement au gré des courants d'air qui traversent la station.

[Bill MacFotia]

Un bref instant de stupeur alors que les faisceaux lumineux de la première équipe éclairent le paysage chaotique dévoilé par l'horrible grincement métallique de l'entrée de la base... suivi d'une certaine sensation de féérie alors que les spores illuminées réfléchissent en tout sens les agressions lumineuses qui sont venus perturber leur ténébreux repos. "Masques !" annonce Bill d'un ton impérieux alors que la plupart des professionnels qui l'accompagnent ont déjà leurs mains prêtes à enfiler l'accessoire sur leur visage.

Quelques instants plus tard, toute l'équipe pénètre en silence dans le bâtiment désormais branlant et bien plus inquiétant que ce que laissait présumer le plan. Les torches repoussent aussi loin qu'elles le peuvent les ténèbres qui cherchent à les cerner de toute part, mais sans rapporter d'autres données que l’omniprésence de cette mystérieuse végétation qui semble avoir englouti la base entière. Les faisceaux révèlent cependant une information des plus cruciales : là où devait se situer la porte de la salle de réunion sur leur gauche, règne désormais un trou béant colonisé par ces énigmatiques plantes.

Bill lâche sur le sol, près de l'entrée, un sac assez lourd -- qui contient plusieurs cordages -- puis effectue quelques pas dans le couloir et se glisse dans une sorte de recoin situé en amont de la porte. Il épaule son fusil, prend la ligne du corridor et attend que l'équipe de Soren soit en position à l'entrée de la base avant de faire signe au reste de ses propres hommes -- Rempart, Blondie et Varun -- de pénétrer dans la salle de réunion.

[Dahey]

Sous les masques il était bien difficile de deviner les émotions qui allaient potentiellement affecter ou parasiter les intentions, les mécanismes, les automatismes, jusqu'à la motricité de chaque membre de l'unité d'intervention. Cependant, même à visage découvert c'était un exercice pour lequel Hugo faisait preuve d'un profond désintérêt. Certes la spectaculaire métamorphose du plan papier en ce décor irréel ne put que le déstabiliser et saboter tout ce que son logiciel avait prévu pour lui. - Ah... Pour ne pas vaciller il se cramponna au plan et aux ordres de son officier, se glissant entre Rempart et Blondie les deux présences féminines - humaines - de l'escouade. LK mid LVI modèle GINAZ apprécia-t-elle ? Quoi qu'il en fut, tandis que la main experte de son bonhomme enserra sa garde, elle prit une grande inspiration. Puis dans un long souffle feutré par le doux vêtement suédé de son étui elle vint se dévoiler le long du radius de son porteur en position inversée, fendant le flot des spores.
A deux pas d'eux se trouvait déjà niché dans une alcôve le Lieutenant et face à lui, béante, l'entrée de la salle de réunion.

[Karasu]

La mise en place était à peu près conforme à ce que l'on pouvait en attendre. Les gardes, soit anciens militaires soit formés par d'anciens militaires, savait faire ce que l'on exigeait d'eux. L'ouverture lente de la porte commença à faire grimacer Soren qui marmonne pour lui même.

-" Hasard ... Pas de courant ... ".

Il suivait avec attention la progression du groupe de tête alors que sa troupe restait en sécurisation. Il aperçoit les spores et le feuillage dans la lueur des lampes ce qui accentue sa mauvaise humeur. L'ordre du lieutenant ne tarde pas.

-" Masques !".

Alors que tout le monde sort son masque, un petite voix s'élève.

-" Lieutenant, vous pensez que ...".

Les gestes de code que Soren adresse à Bren sont répertoriés dans le manuel idoine comme signifiant "SILENCE". Néanmoins, couplés avec le regard furieux qu'elle reçoit et l'index menaçant qui se pointe sur elle, on traduirait plutôt par "FERME TA GUEULE OU JE T'ASSOMME".

Ce bref instant passé, les masques sont à poste et la moitié des regards des gardes continue de suivre la progression en couverture, installés à leur place à l'entrée du site, l'autre moitié assurant la couverture arrière.

[[LOUPS] Maître du Jeu]

Alors que l'équipe pénètre dans la salle de réunion, l'air est lourd et saturé d'une odeur nauséabonde qui les assaille dès les premiers instants. Ils échangent des regards perplexes, essayant de déterminer d'où vient cette puanteur, mais aucune source identifiable n'apparaît immédiatement sous la lumière vacillante de leurs lampes. Le faisceau de leurs lampes éclaire la pièce, révélant que contrairement aux autres sections de la base, la salle de réunion semble étrangement intacte. Le mobilier est en place, les chaises sont rangées autour de la grande table centrale, mais un voile de spores en suspension flotte dans l'air, capturant la lumière comme une poussière fine et dorée.

Leurs oreilles sont particulièrement attentives à chaque son, amplifié par l'atmosphère pesante de l'obscurité. Le bruit des vagues frappant contre les fondations de la base semble plus proche, presque menaçant. Le métal grince, comme un vieux navire qui lutte contre les forces de l'océan. L'ambiance est oppressante, chaque vibration du métal semble accentuer la tension dans la pièce. Tous les regards remarqueront la seule porte entrebâillée, celle qui mène au "Bureau du Chef de Projet". Toutes les autres portes de la salle restent fermées. Mais cette porte-là... semble les inviter, ou peut-être les défier, à découvrir ce qui se cache derrière.

Les pas de l'équipe résonnent sourdement sur le sol métallique, tandis qu'ils avancent prudemment, les lampes pointées droit devant eux.

[Bill MacFotia]

Le temps s'étire lentement tandis que Bill conserve sa position et que les trois membres de son équipe investissent la salle de réunion. Une poignée de secondes qui forment à peine une minute, mais qui semblent toujours durer des heures dans des moments pareils... Finalement, un mouvement lumineux latéral dans la vision périphérique de l'officier. Il lève sa main gauche à hauteur de casque pour signifier qu'on vienne le remplacer et lorsqu'une main ferme vient lui tapoter l'épaule, il se redresse et se dirige d'un pas confiant en direction de la salle de réunion. Trois simples enjambées durant lesquelles il éteint la torche de son fusil, le bascule en arrière et dégaine son arme de poing. Un mouvement sec de l'index et son propre faisceau lumineux jaillit pour aller rejoindre celui de ses hommes, éclairant l'intérieur de cette première salle qu'ils doivent traverser pour effectuer leur long périple de sécurisation de la base.

La lumière balaie rapidement l'espace : le relatif agencement paisible de la salle, Blondie et le Caporal déjà en position près de la porte fermée de la salle technique, les innombrables spores qui ont colonisé l'endroit, Rempart qui l'attend, non loin de la porte entrebâillée du bureau du chef de projet, les vagues qui s'écrasent contre les murs fragilisés de la base, le grincement glauque du métal, la puanteur omniprésente... Bill enregistre les informations de manière objective. Quelque part au fond de lui, il ressent pourtant bien un début d'oppression, une sensation de malaise qui n'espère qu'une chose : grandir, s’épanouir et se répandre au sein de l'officier. Mais il est passé en mode automatique. Comme les soldats qui l'entourent, il a été longuement entrainé à mettre au second plan tous les stimuli extérieurs -- sans les ignorer complètement, ce qui lui serait fatal -- et se concentrer sur ses propres actions. Ramper sur les corps déchiquetés de ses propres hommes pour survivre, a aussi tendance à vous faire basculer plus aisément dans ce type de fonctionnement, pour le meilleur ou pour le pire...

Bill rejoint Rempart et se positionne derrière elle du côté légèrement ouvert de la porte. Il actionne son bouclier personnel -- Bzzzzt --- et place sa main gauche sur l'épaule de sa camarade pour signifier qu'il est prêt. Il se tourne ensuite à demi en direction du second binôme afin de vérifier son état. Satisfait du retour visuel, il donne le signal d'action au Caporal puis tapote deux fois sur l'épaule de son propre binôme. La combattante à la carrure massive pousse alors la porte et pénètre dans la pièce, fusil-mitrailleur en joue et Bill sur ses talons.

[Dahey]

Une vibration, l'espace d'une seconde, avait semé l'agitation dans le bouillon d'électrons partagés entre les atomes métalliques, fer, manganèse, silicium et le carbone de LK mid LVI modèle GINAZ. L'activation du bouclier du lieutenant MacFotia avait créé une réaction en chaine, et un à un tous ceux de son escouade avaient vrombit. Étrangement alors que le binôme formé par Blondie et Hugo - Varun selon les codes attribués - progressait dans la première pièce, rien ne justifia que la lame ne s'ébranla plus que ça. Hermétique à l'atmosphère qui avait noyé le complexe scientifique, elle maintenait sa position d'avant garde juste après les faisceaux lumineux mordorés par les suspensions végétales microscopiques.
Son partenaire humain, lui semblait s'en tenir strictement aux instructions préalables tant qu'un obstacle ou un événement ne le de déviait pas du parcours prévu. Lâchant du regard Varun préoccupé par la porte du local technique face à eux, Blondie prit deux secondes pas plus pour renseigner leur officier : Rien à signaler - Poursuivons. Évitant tout contact physique avec son binôme si particulier, la jeune femme revint se placer derrière lui faisant dépasser son arme de poing au dessus de l'épaule gauche.

[Karasu]

Les binômes progressaient sans problème à l'intérieur même si il était difficile d'y voir quelque chose. Néanmoins l'absence de cris, de bruits de rafales et le fait que les faisceaux des lampes étaient toujours pointés dans des directions conformes au plan (du moins pour ceux qui avaient vocation à rester visible pour les six gardes) faisaient qu'on pouvait légitimement supposer que les choses se passaient sans problème. Pour la troupe du connétable, répartie à l'entrée, l'instant était à l'attente. Une des pires si ce n'est pas pire période de la guerre. C'est souvent celle où naissent les plus grosses conneries. En tout état de cause, pour l'instant, rien ne se passe ni devant, ni derrière.

[[LOUPS] Maître du Jeu]

Bill rejoint Rempart et se positionne derrière elle du côté légèrement ouvert de la porte. Il actionne son bouclier personnel -- Bzzzzt --- et place sa main gauche sur l'épaule de sa camarade pour signifier qu'il est prêt. Il se tourne ensuite à demi en direction du second binôme afin de vérifier son état. Satisfait du retour visuel, il donne le signal d'action au Caporal puis tapote deux fois sur l'épaule de son propre binôme. La combattante à la carrure massive pousse alors la porte et pénètre dans la pièce, fusil-mitrailleur en joue et Bill sur ses talons.

Bill et Rampart pénètrent avec précaution dans le bureau du chef de projet. La première chose qu’ils remarquent, c’est que la pièce, bien que partiellement envahie par des plantes aux allures étranges, semble en meilleur état que le reste de la base. Le générateur local fonctionne encore, fournissant une lumière électrique faible mais stable, qui contraste avec l’obscurité lourde et pesante de la salle de réunion qu'ils viennent de quitter. Rampart balaye la pièce avec son fusil-mitrailleur, à l'affût du moindre mouvement. Les spores en suspension brillent faiblement sous l’éclairage artificiel, mais aucun signe immédiat de danger ne se manifeste. Si Bill s’avance prudemment vers l'enregistreur audio du bureau, il constatera qu'il est allumé, une bande tourne en boucle, sans le son.

S'il active le son d’un mouvement rapide, la voix d’un homme visiblement paniqué retentira dans la pièce.

« ...nous avons perdu le contrôle. Les autres, ils sont devenus fous... Ils parlent de sacrifices à l'océan, qu’en faisant ça, ils sauveront Lykos... d'ELLE... Je vous en prie, si ce message atteint quelqu’un... QU'ON NE VIENNE PAS NOUS SECOURIR ! Qu'on nous laisse ici... L’océan doit nous engloutir. Surtout, ne tentez rien ! Laissez-nous mourir ici... »

L'audio s’arrête brusquement, mais la bande redémarre aussitôt, repassant en boucle la même séquence. Rampart, cherchant à capter le regard de Bill à travers le masque, balaie toujours l’environnement du regard. La gravité des mots du chef de projet plane dans l'air lourd, remplissant la pièce d'une tension nouvelle.